A priori, une place François
Truffaut dans le 5ème arrondissement a de quoi surprendre,
quand on connaît un peu Paris et qu'on sait que la rue François
Truffaut, ouverte il y a une vingtaine d'années dans le
nouveau quartier de Bercy, pas très loin de la Cinémathèque,
se trouve donc dans le 12ème arrondissement.
(On évitera aussi la confusion avec la rue Truffaut du 17ème arrondissement, dans le quartier des Batignolles, qui doit son nom au propriétaire d'un terrain sur lequel elle a été créée, au 19ème siècle.)
(On évitera aussi la confusion avec la rue Truffaut du 17ème arrondissement, dans le quartier des Batignolles, qui doit son nom au propriétaire d'un terrain sur lequel elle a été créée, au 19ème siècle.)
Cette plaque se découvre en fait
derrière les murs de l'Institut National de Jeunes Sourds de
Paris, situé à l'angle de la rue Saint-Jacques et de la
rue de l'Abbé-de-l'Epée. Une place intérieure en
quelque sorte, en hommage au réalisateur qui y tourna en 1969
une partie de son film L'Enfant Sauvage, sorti en 1970. Une autre plaque commémore d'ailleurs explicitement le tournage en ces lieux, qui dura huit jours.
C'est par un dimanche de septembre
qu'on a poussé la porte de l'INJS, pour découvrir ce
bel endroit dont l'origine remonte au 13ème siècle, où
il fut créé pour servir de refuge et d'hôpital
aux pèlerins de Saint-Jacques de Compostelle. Devenu abbaye au
17ème siècle, époque de laquelle date la
configuration actuelle des bâtiments, il accueille à
partir de la fin du 18ème siècle un institut pour les
enfants et les jeunes adultes sourds et muets.
Ce n'est pas par hasard que Truffaut situe en ces lieux plusieurs scènes de L'Enfant sauvage. On sait que le film relate l'histoire vraie d'un enfant d'une dizaine d'années trouvé en 1798 par des paysans dans une forêt de l'Aveyron, à l'état sauvage, ne sachant ni marcher ni parler. Il est recueilli par le Docteur Itard, médecin de l'institution de la rue Saint-Jacques, qui le prénomme Victor et va entreprendre son éducation, notamment son apprentissage du langage. Truffaut a voulu son film fidèle aux rapports rédigés par le Docteur Itard, dont il joue lui-même le rôle.
L'arrivée de Victor rue Saint-Jacques, où il est accueilli par le Docteur Itard. |
Quelque 45 ans après, on a reconnu les lieux du tournage.
A propos du bassin de l'Oratoire, au bord duquel La Fontaine aurait composé Le corbeau et renard, le docteur Itard note dans un de ses rapports : «
Ainsi, lorsque la rigueur du temps chassait tout le
monde du jardin, c’était le moment qu’il choisissait
pour y descendre. Il en faisait plusieurs
fois le tour et finissait par s’asseoir au bord du
bassin. Je me suis souvent arrêté pendant des heures
entières et avec un plaisir indicible, à l’examiner
dans cette situation ; à voir comment tous
ces mouvements spasmodiques et ce balancement
de tout son corps diminuaient, s’apaisaient
par degrés, pour faire place à une attitude
plus tranquille ».
On ne manquera pas de noter, pour terminer, que le film est dédié à Jean-Pierre Léaud.
"Jusqu'à L'Enfant sauvage, quand j'avais eu des enfants dans mes films, je m'identifiais à eux et là, pour la première fois, je me suis identifié à l'adulte, au père, au point qu'à la fin du montage, j'ai dédié le film à Jean-Pierre Léaud, parce que ce passage, ce relais, devenait complètement clair pour moi, évident. J'ai beaucoup pensé à lui, aux 400 coups, en tournant ce film. Pour moi, L'Enfant sauvage, c'est aussi un passage dans le camp des adultes. Jusqu'à présent, je me considérais dans celui des adolescents." (François Truffaut)
En remerciant J. et F. pour leur bienveillante et inspirante
collaboration.
Billet très instuctif, merci chère Florence. Si je ne dis pas de bêtise, Truffaut séjourna un temps dans un meublé rue Truffaut. Il n'en était pas peu fier...
RépondreSupprimerQuel joli clin d'oeil, merci ! Je crois qu'une petite promenade dans le quartier, qui est d'ailleurs un fief d'Antoine Doisnel, s'imposera...
Supprimer"Doinel", bien sûr... Je sens que ce début de semaine va être difficile !
SupprimerEt je tiens de Michel Lebrun, qui habitait rue Truffaut, qu'un des rêves de FT était précisément de trouver un appartement dans la rue. Mais il ne trouva jamais ce qu'il cherchait...
SupprimerMerci beaucoup pour cette intéressante précision !
SupprimerQuelques années auparavant, Truffaut avait déjà tourné juste à côté.
RépondreSupprimerDans l'une des dernières scènes de Jules et Jim (1962), Jim retrouve par hasard Jules et Catherine au Studio des Ursulines (j'ai oublié à la sortie de quel film — le sait-on seulement ?), dont la sortie de secours donne justement rue de l'Abbé-de-l'Epée, entre la rue Saint-Jacques et la rue Gay-Lussac, à deux pas de l'entrée de l'INJS.
Tiens tiens, je ne m'en souvenais plus. J'irai voir ça de plus près !
SupprimerMerci Florence de nous avoir ouvert les portes de ce très bel endroit !
RépondreSupprimerAvec plaisir !
SupprimerDe belles recherches et le plaisir de replonger dans l'enfant sauvage. Merci à vous, chère Florence.
RépondreSupprimerMerci à vous de venir si souvent vous promener par ici !
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