mardi 21 novembre 2017

Madeleine, peut-être (9 rue du Val-de-Grâce)




"Un jour, elle m'a proposé de l'accompagner chez cette Madeleine Péraud dont j'ai eu du mal à me rappeler le nom. Mais, avec un peu de bonne volonté, ils vous reviennent à la mémoire, ces noms qui demeuraient dans votre esprit sous une légère couche de neige et d'oubli. Oui, Madeleine Péraud. Mais je me trompe peut-être sur le prénom.

Elle habitait au début de la rue du Val-de-Grâce, au numéro 9. Depuis, je suis souvent passé devant la grille qui donne accès à un jardin entouré de trois façades d'immeuble avec de grandes fenêtres. Je me suis même retrouvé là, par hasard, il y a quinze jours. Et c'était à l'heure où nous franchissions la grille, Geneviève Dalame et moi. Cinq heures du soir en hiver, quand la nuit tombait et que l'on voyait déjà de la lumière aux fenêtres. J'ai eu la certitude que j'étais revenu dans le passé par un phénomène que l'on pourrait appeler l'éternel retour ou, simplement, que pour moi le temps s'était arrêté à une certaine période de ma vie."

Patrick Modiano, Souvenirs dormants (Gallimard, 2017)




"C'est ainsi qu'il suffit de croiser une personne ou de la rencontrer à deux ou trois reprises, ou de l'entendre parler dans un café ou le couloir d'un train, pour saisir des bribes de son passé. Mes cahiers sont remplis de bouts de phrase prononcés par des voies anonymes. Et aujourd'hui, sur une page semblable aux autres, j'essaye de transcrire les quelques mots échangés il y a près de cinquante ans avec une certaine Madeleine Péraud dont je ne suis même pas sûr du prénom."

Patrick Modiano, Souvenirs dormants (Gallimard, 2017)



dimanche 19 novembre 2017

Parenthèse




Le génie, enfin sorti de sa lampe, était prêt à exaucer mes vœux.

Mon cher ami était bien là.
Il est des rendez-vous qui ne se manquent pas.

Sieste au soleil d'automne


Heureux comme un poisson dans l'arbre


Vous passerez à droite des cimetières

Entre Lure...
... et le Ventoux

Retour au village dans les derniers rayons. Point. Fermez la parenthèse.

* * *


"Des livres, en revanche, on en avait à profusion, les murs en étaient tapissés, dans le couloir, la cuisine, l'entrée, sur les rebords des fenêtres, que sais-je encore ? Il y en avait des milliers, dans tous les coins de la maison. On aurait dit que les gens allaient et venaient, naissaient et mouraient, mais que les livres étaient éternels. Enfant, j'espérais devenir un livre quand je serais grand. Pas un écrivain, un livre : les hommes se font tuer comme des fourmis. Les écrivains aussi. Mais un livre, même si on le détruisait méthodiquement, il en subsisterait toujours quelque part un exemplaire qui ressusciterait sur une étagère, au fond d'un rayonnage dans quelque bibliothèque perdue, à Reykjavík, Valladolid ou Vancouver."

jeudi 16 novembre 2017

Something



Il m'a semblé que quelque chose se tramait...
Une menace ?
Une rencontre ?
Le début de quelque chose ?

mardi 14 novembre 2017

Rue Erasme



"Nous avions débouché sur cette rue très large qui borde les bâtiments modernes de l’École normale supérieure et de l’École de physique et chimie et qui vous donne l'impression d'être perdu dans une ville étrangère – Berlin, Lausanne, ou même Rome, dans le quartier du Parioli – au point que vous vous demandez si vous ne marchez pas dans un rêve, et que vous finissez par douter de votre propre identité."

Patrick Modiano, Souvenirs dormants (Gallimard, 2017)

dimanche 12 novembre 2017

samedi 11 novembre 2017

"Une saison qui ne m'a jamais semblé triste"



"Quel bel automne c'était… une saison qui ne m'a jamais semblé triste… elle marque souvent le début de quelque chose… Je l'attendais sur le trottoir, au bas de la rue, devant le théâtre… Quelquefois, j'ai l'impression que depuis cet automne-là nous montons la pente de la rue Blanche jusqu'à la fin des temps…"

Patrick Modiano, Nos débuts dans la vie (Gallimard, 2017)


Les autres couleurs de l'automne

jeudi 9 novembre 2017

99 ans



"Hommes de l'avenir souvenez-vous de moi"
 

dimanche 5 novembre 2017

Promenades (13) - Tout au fond du XIIIe arrondissement (2)



C'était un dimanche d'août. La promenade a commencé près des boulevards extérieurs, quartier Maison-Blanche. Au hasard des rues, on a pu se rendre compte que le treizième arrondissement n'avait rien perdu de son charme paisible de province endormie...

Éblouissement...

Et je ne sais pas vraiment pourquoi m'est venu alors à l'esprit de façon presque lancinante ce vers de Rimbaud :
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien...


Petite ceinture, grand calme...

"On se retrouve souvent seul à Paris au mois d'août et dans des endroits incertains, à l'image de cette saison où l'on a l'impression que le temps s'est arrêté - des endroits qui disparaissent aussitôt que la vie a repris son cours, et la ville son aspect habituel."
Patrick Modiano, Souvenirs dormants (Gallimard, 2017)



Sans même s'en rendre compte, on arrive à la Butte-aux-Cailles, royaume de Miss.Tic, où n'est jamais bien loin le fantôme de la Bièvre.

"Vive les filles de Paris
Vive les filles de la Bièvre
vive les baisers évanouis
Que gardera le rouge à lèvres"
Pierre Mac Orlan

La Tour Albert, ou Gratte-Ciel n°1, première tour de logements de Paris,
édifiée en 1960, et cette chère "usine"...

Retour par mon cher quartier Croulebarbe, déjà évoqué notamment ici...

"Alors Lise, qui ne travaillait point, prit la place d'Étiennette et ce fut elle qui me promena sur les borsd de la Bièvre. Vers midi, quand le soleil était dans son plein nous partions, et, nous tenant par la main, nous nous en allions doucement suivis de Capi. Le printemps fut doux et beau cette année-là, ou tout au moins il m'en est resté un doux et beau souvenir, ce qui est la même chose."
Hector Malot, Sans famille

* * *


J'ai trouvé les citations de Pierre Mac Orlan et Hector Malot dans le très plaisant "Un été sur la Bièvre" d'Adrien Gombeaud.

mercredi 1 novembre 2017

Gobelins (19) - Rue Monge (3) - Chambres d'hôtel et points névralgiques



"Au début, elle hésitait à me dire où elle habitait exactement. Quand je lui avais posé la question, elle m'avait répondu : "A l'hôtel." Nous nous connaissions depuis deux semaines et, un soir où je lui avais offert le Dictionnaire pratique des sciences occultes de Marianne Verneuil et un roman où il était question d’ésotérisme, A la mémoire d'un Ange, elle m'a proposé de la raccompagner jusqu'à cet hôtel.

Il se trouvait au bas de la rue Monge, à la lisière des Gobelins et du treizième arrondissement. Près d'un demi-siècle a passé et l'on n'habite plus dans des chambres d'hôtel à Paris comme on le faisait souvent après la guerre et jusqu'aux années soixante. Geneviève Dalame aura été la dernière personne que j'ai connue à habiter dans une chambre d'hôtel. Il me semble aussi qu’au cours de ces années 1963, 1964, le vieux monde retenait une dernière fois son souffle avant de s'écrouler, comme toutes ces maisons et tous ces immeubles des faubourgs et de la périphérie que l'on s'apprêtait à détruire. Il nous aura été donné, à nous qui étions très jeunes, de vivre encore quelques mois dans les anciens décors."


"Paris est ainsi constellé de points névralgiques et des multiples formes qu'auraient pu prendre nos vies."