vendredi 31 août 2018

mercredi 29 août 2018

Le pouvoir des lieux



"Nous arrivâmes au début de l'été 1962 et nous partîmes au début de l'été 1968. Six courtes années, mais une vie entière, en réalité, une éducation sentimentale qui ne se répéterait jamais.
Car il ne faut jamais sous-estimer le pouvoir - bénéfique, maléfique, profond et irrésistible - des lieux."



dimanche 19 août 2018

Les lunes de l'été


17 juillet - Un classique premier croissant

26 juillet - La veille de son show, the Lady of the Night se préparait dans sa loge,
tout en éclat et en sélénité.

27 juillet - Le Grand Soir. Madame est dans l'ombre de la Terre,
et ça lui va bien au teint.

12 août - Les conditions étaient particulièrement favorables pour observer,
au sortir de son berceau, une nouvelle-née d'à peine 36 heures...

14 août - Deux jours plus tard, la nourrissonne était déjà devenue
une bien belle enfant.

Une histoire simple (fin de saison)

vendredi 17 août 2018

Solitude (14)



"Il montra la porte du fond. Et puis il prit congé.
Par la fenêtre, je le regardai partir. Sous la pluie il suivait le sentier, et sans hâte il s'enfonça à travers le bois, où soufflait le vent.
De nouveau je fus seul.
*
Il n'y a pas deux temps pareils de solitude, car jamais on n'est seul de la même façon. Il est des êtres singuliers dont le passage vous inspire un sentiment plus vaste ou plus profond d'isolement, après qu'ils vous ont laissé seul. Plus eux-mêmes sont solitaires, plus leur présence vous emplit, plus leur absence vous laisse de vide. Peut-être vous accordent-t-ils, eux qui sont faits pour le désert, aux lois secrètes de la solitude."
 

"Je venais de dîner : il était une heure. Il faisait encore plus doux que de coutume ; et, disposé, par la douceur de l'air à une grande confiance, je résolus d'aller jusqu'au fleuve, en me promenant. J'étais seul. Je le sentais bien; et non plus comme aux premiers temps de mon séjour à La Redousse ; car je l'étais physiquement. Il n'y avait que moi dans l'île, et j'en étais sûr. Cette certitude m'enchantait. De tous côtés de grandes eaux me séparaient des hommes ; et, délivré de leurs présences inquiétantes, j'avançais d'un pas libre au milieu des arbres tranquilles avec le sentiment d'une primitive innocence. Sentiment pur, où ne se concentraient pas mes réflexions, et d'où ne s'élevait aucune ombre de songe. J'étais un corps, un corps indivisible, où tout, la chair, l'âme, les bois, le ciel tendre, l'odeur des écorces amères, la brise, formaient une unité vivante merveilleusement saisie par la joie de marcher dans une authentique solitude. J'étais sensuellement seul. Aucune présence morale ne se substituait à l'absence des hommes, et rien ne me hantait. Mes pensées n'étaient que mes pas et mon souffle facile ; et je m'avançais vers le fleuve sans le redouter."

Photographie de Alain Etchepare - Blood of earth

"Or ma nouvelle solitude ne me pesait pas ; elle m'allégeait. J'avais rompu. Je ne voyais point trop encore sur quoi portait cette rupture ; car j'étais obsédé par une sensation mal définie, mais d'une puissante présence, qui m'exaltait et m'emplissait de crainte ; et c'était d'être détaché, libre peut-être (toutefois ceci est moins sûr). Détaché des miens, que j'aimais ; et déjà sur le fil du fleuve mystérieux, ce fleuve qui coulait en moi et dont j'avais toujours ignoré l'existence, tout à coup révélé par le bruit de ses flots et la vision, confuse encore, de ses rives. J'étais traversé par de grandes eaux sombres, et cette idée me hanta si tragiquement que, vers cinq heures, je sortis de la maison, malgré la neige, pour aller voir le fleuve."

* * *

"Je ne bougeais plus ; j'avais peur. Il faisait froid. Le fleuve, argenté par le ciel, entre ces rivages du froid étincelant, s'éloignait en silence. C'était bien un fleuve pour les solitudes. On les voyait, ces solitudes, au-delà des eaux glaciales, se perdre vers l'Ouest..."

mardi 14 août 2018

Les grands chemins (2)



« Une route sait généralement ce qu'elle fait ; il n'y a qu'à la suivre. »

dimanche 12 août 2018

La tentation mauve (9) - L'acte créateur



"Deux semaines après avoir repris ses allers-retours en métro à Brooklyn, ses œuvres complètes parurent chez Tumult Books. Après un été si pénible, Prolusions jaillit du sol de manière aussi inattendue que le premier crocus au début du printemps, un éclair pourpre sortant de la boue et de la neige noircie, une pointe de couleur magnifique dans un monde par ailleurs totalement incolore, et justement la jaquette de Prolusions était pourpre, cette nuance de pourpre qu'on appelle mauve, la couleur que Ron et Ferguson avaient choisie parmi de nombreuses couleurs disponibles, une couverture à la typographie austère avec le nom de l'auteur et le titre en noir entourés d'un mince rectangle blanc – clin d'œil au couverture de Gallimard en France – que Ferguson trouvait élégante, si élégante, et quand il tint pour la première fois à la main un exemplaire de son livre, il éprouva un sentiment auquel il ne s'attendait pas : un éclair d'exaltation. Pas très différente de l'exaltation qu'il avait ressentie après avoir obtenu la bourse Walt-Whitman, se dit-il, mais à la différence près que la bourse lui avait été retirée mais que ce livre serait toujours le sien, même s'il ne trouvait que dix-sept lecteurs."

Paul Auster, 4 3 2 1 (Actes Sud)


samedi 11 août 2018

L'entrée en lumière


Nicolas de Staël, Arbres (1953)

"Les arbres fantomalement formaient comme une forêt sous-marine, où les ondes, douces et longues, de cette clarté, glissaient entre les branches, telles des nappes d'eau faiblement colorées par de fugitives phosphorescences. Pas un souffle, pas un contour qui ne fût entré en lumière. Elle était l'unique substance. Les corps en devenaient clairs et subtils. J'allais sous l'enchevêtrement des branches magnétiques qu'une étrange végétation de lueurs impalpables formait au-dessus de ma tête où le monde des vents gardait le silence. Nulle bête des bois, nulle feuille échappée ne troublait la paix merveilleuse de cette fragile illumination."

Henri Bosco, Malicroix (1948)