jeudi 30 juillet 2015

Les rendez-vous de juillet (3) - Un anniversaire et une fête


 
Patrick Modiano est né le 30 juillet 1945. Alors bon anniversaire, Monsieur Modiano ! Continuez de nous enchanter dans les méandres mélancoliques des rues de Paris, de la mémoire et du temps. Je ne pense pas avoir un jour un chien, mais si j'en avais un, je crois bien que ça serait un labrador et que je l’appellerais Choura.

Et puis le 30 juillet, on fête aussi les Juliette.

Jérôme Leroy, Sauf dans les chansons (La Table Ronde, avril 2015)

13 commentaires:

  1. l'Anonyme historique de ce blogue30 juillet 2015 à 14:43

    On souhaite une très joyeuse fête à Juliette M. (bel hommage de JL!),

    et un heureux septantième anniversaire à Patrick M,

    de loin…

    (70 ans, vraiment?… Souvenons-nous qu'au moment où il a publié ses premiers romans, Modiano prétendait être né en 1947. Il a plus tard donné une explication fumeuse de cette falsification: "Quand j'avais 19 ans, j'avais falsifié mon passeport pour faire croire que j'avais 21 ans, l'âge de la majorité. J'avais inscrit '1943' au lieu de '1945'. Après, je l'ai refalsifié pour rétablir la date, mais il était plus facile de transformer le 3 en 7 qu'en 5. Je me suis alors trouvé pris à mon propre piège: Gallimard avait photocopié mon passeport car j'étais en lice pour le prix Fénéon, un prix décerné à de jeunes écrivains... il fallait prouver que l'on n'avait pas encore 35 ans. Du coup, cette date de 1947 s'est trouvée officialisée, et cela m'a poursuivi." Il me paraît plus significatif de noter que 1947 est l'année de naissance de Rudy, le frère cadet bien aimé disparu à l'âge de 10 ans, dédicataire posthume de tous ses romans jusqu'à De si braves garçons.)

    Très belle fin de juillet à vous, Florence.

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  2. l'Anonyme cynique de ce blogue30 juillet 2015 à 15:01

    (Et à propos de Modiano et des chiens: deux de ses livres, Fleurs de ruine et Accident nocturne, sont dédiés à un certain Douglas. Un ouvrage de son complice Pierre Le-Tan est même dédié 'À Douglas Modiano'. Douglas était le chien de la famille: était-ce un labrador aux yeux bleus? // Quand Modiano écrit ses souvenirs, il les intitule Un pedigree, et dans ce livre il s'identifie explicitement au chien de sa mère, négligé et malheureux, qui un jour s'est jeté par la fenêtre. // Dominique Zehrfuss, sa compagne, a publié un livre de souvenirs sous le titre Peau de caniche: autre clin d'œil à leur création commune, Choura. // Leur fille Zina Modiano a publié il y a une dizaine d'années un petit livre pour enfants qui raconte les aventures d'un chien mythomane, dont le modèle n'est pas trop difficile à deviner.)

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  3. Douglas Modiano, comme c'est joli. J'aime bien l'idée de donner le nom de la famille à un chien, comme pour Choura Vervekken.
    Merci, cher Anonyme, pour toutes ces précisions cyniques et historiques, ainsi que pour vos souhaits. Je vous souhaite également un bel été.

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  4. Tout comme Faustine.
    On n'est jamais trop été.

    Je lis pour ma part dans le titre choisi par Jérôme "Juliette aime", évidemment.

    Et je ne suis pas peu fier d'avoir modestement participé à cette dilection…

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  5. Eh oui !
    "Faustine et le bel été", je ne l'ai pas vu, mais ce que le lis du scénario et de la distribution semble séduisant.
    Quant à "Juliette aime", c'est étrange mais je n'y avais même pas pensé...

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  6. l'Anonyme historique de ce blogue19 août 2015 à 23:50

    Dans Quartier perdu, on lit page 126: "J'aurai trente-neuf ans à la fin du mois de juillet…" Le livre paraît en janvier 1985, l'achevé d'imprimer date du mois de décembre de l'année précédente: c'est en 1984 que Modiano a dû écrire ces mots; le 30 juillet 1984, il a eu trente-neuf ans. Mais c'est Jean Dekker, alias Ambrose Guise, le narrateur du roman (lui-même romancier), qui parle. Sa date de naissance semble donc se confondre avec celle de l'auteur -- avec la vraie date de naissance de Modiano, en 1945 et non pas 1947 comme il l'a prétendu jusqu'en 1977.

    Un peu plus loin, page 147, évoquant son "faux-départ dans la vie", et ces quelques mois qu'il a ensuite écartés de sa mémoire, le narrateur de Quartier perdu fait cette comparaison ironique: "Certaines femmes, pour se rajeunir, occultent cinq ans de leur existence. Alors trois mois… Et pourtant, je sais que ce faux-départ aura donné un ton particulier à ma vie et qu'il en est le fond sensible."

    Enfin, vers la fin du roman, page 178, il se souvient du jour, vingt ans plus tôt, où tout a basculé pour lui; ce jour-là il lui a fallu remplir une fiche à l'hôtel Malakoff: "Je ne voulais pas avoir l'air d'hésiter devant lui [le concierge de nuit de l'hôtel]. Alors j'ai écrit mon vrai nom: Jean Dekker, et ma vraie date de naissance: 25 juillet 1945. Et même l'endroit exact où j'étais né: Boulogne-Billancourt." On dirait qu'in fine, Modiano a voulu marquer un écart entre lui et son personnage/narrateur, alors il l'a finalement fait naître cinq jours avant lui… Mais, dans un mouvement inverse, il lui a aussitôt attribué comme lieu de naissance la ville où il est réellement né lui-même.

    Dernière remarque: à l'état-civil, Modiano s'appellerait Jean Patrick Modiano. Jean, le prénom de Dekker dans le roman, serait donc son vrai premier prénom.

    (Il est certain que s'il avait signé ses premiers ouvrages Jean Patrick Modiano, Guy Debord aurait soutenu qu'il s'agissait d'un hétéronyme de Jean-Patrick Manchette, qui lui-même n'existait pas et n'était qu'un pseudonyme de Jean-Pierre George.)

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    1. Cette dernière remarque, à laquelle j'ai moi-même aussitôt songé à la lecture du paragraphe précédent, constitue cependant un anachronisme puisque Modiano publie ses premiers romans en 1968 et 1969 tandis qu'il faudra attendre 1971 pour voir paraître L'affaire N'Gustro (après Laissez bronzer les cadavres, certes, mais ce Série Noire n°1394 était signé "J. P. Manchette-Bastid", sans précision des prénoms respectifs).

      En outre, ce n'est que plus tard (vers 1975, me semble-t-il) que Debord écrira cette assertion délirante à Lebovici — qui avait pourtant eu recours aux services de Mélissa Manchette et de son époux comme traducteurs avant l'arrivée de Debord dans son écurie…

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    2. l'Anonyme approximatif de ce blogue20 août 2015 à 19:07

      Vous avez tout à fait raison, cher George. En fait, dans mon esprit, les trois premiers romans de Modiano forment un monde un peu à part dans son œuvre; et j'ai le sentiment (peut-être fallacieux) que son nom n'est arrivé à la connaissance d'un large public qu'avec Villa triste (1975) et surtout Rue des Boutiques obscures (couronné par le Goncourt en 1978).

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    3. l'Anonyme antistrophique de ce blogue20 août 2015 à 19:18

      (Et qui d'autre que vous, cher George, peut se souvenir en lisant le nom de ce prix qu'un des membres du jury rival du Fémina, mais je ne sais plus qui, disait spirituellement, dans les années 80, qu'à tout prendre il vaut mieux avoir le Goncourt que le con gourd.)

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    4. Ah mais détrompez-vous, je ne connaissais nullement cette contrepèterie ! (il faut dire que je n'ai jamais suivi assidûment les propos des membres des jurys littéraires…)

      La reconnaissance de Modiano a certes été tardive : à preuve, le fait que ses deux premiers romans n'ont pas fait l'objet de grands papiers (et du coup le prix de ces éditions originales — que j'ai — atteignent des hauteurs injustifiables…)

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    5. Cette facétie du juré Fémina, n'était-ce pas en 1984, après l'attribution du Goncourt à L'amant ?

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    6. l'Anonyme hypothétique de ce blogue20 août 2015 à 20:57

      L'Amant: oui, vous avez raison, ça devait être à ce moment-là. Faut-il attribuer ce trait d'esprit à Régine Deforges?…

      ¶ Les prix des é.o. des premiers romans de Modiano: cela vient aussi, je crois, du fait que l'espèce de jeu parodique assez trouble sur la rhétorique antisémite auquel il se livre dans ces romans à la première personne a été sensiblement atténué au fil des rééditions. Il s'agissait évidemment de créer un certain malaise chez le lecteur, mais on peut se demander s'il n'a pas lui-même ressenti de la gêne en relisant ce qu'il avait écrit, des années après. Se reconnaissait-il encore dans le jeune homme fasciné par Céline, Drieu la Rochelle, Chardonne, Morand, et qui savait si bien se glisser dans le style de leurs écrits les plus sulfureux? Peut-être même a-t-il craint des poursuites, les lois s'étant durcies pour réprimer ce genre de propos (et l'appréciation du second degré étant toujours une chose bien délicate, en particulier pour des magistrats)? — Je note aussi que la Préface de Jean Cau a disparu tout de suite de La Place de l'Étoile, dès la première reprise en Folio, me semble-t-il. L'Académie Nobel, qui a couronné l'œuvre pour sa dimension mémorielle, a-t-elle tout à fait perçu le rapport tourmenté de Modiano à la mémoire?

      En tout cas, ces altérations (qui sont, pour des raisons diverses, presque une constante: je crois qu'il a beaucoup changé La petite Bijou, et que même Dora Bruder a fait l'objet de modifications qui ne sont pas indifférentes) font que les premières éditions de ses livres présentent un intérêt pas seulement du point de vue des fétichistes ou des collectionneurs.

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  7. Très intéressant, merci beaucoup !
    J'avoue qu'ayant lu Quartier perdu peu de temps avant de publier ce billet, que j'avais déjà en partie préparé, ces correspondances manifestes entre l'auteur et le narrateur alliées à ce détail sur le jour de naissance m'ont troublée, et je ne savais plus très bien si finalement la date anniversaire de PM était le 25 ou le 30 juillet. J'ai dû revérifier pour être sûre de ne pas faire d'erreur...

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