vendredi 13 juin 2014

Quelle joie, René, quelle joie !


Parc des Princes - 1952
 "Paris, 10 avril 1952

Très cher René,

Merci de ton mot, tu es un ange, comme les gars qui jouent au Parc des Princes la nuit. Je n'arrive pas à te joindre par téléphone, il y a une abeille asexuée qui bourdonne sur la langue de cette femme en sycomore qui s'intègre à ton hôtel.

Je pense beaucoup à toi. Quand tu reviendras, on ira voir des matchs ensemble, c'est absolument merveilleux, personne là-bas ne joue pour gagner si ce n'est à de rares moments de nerfs où l'on se blesse.

Entre ciel et terre, sur terre rouge ou bleue, une tonne de muscle voltige en plein oubli de soi, avec toute la présence que cela requiert en toute invraisemblance. Quelle joie, René, quelle joie !

Alors j'ai mis en chantier toute l'équipe de France, de Suède, et cela commence à se mouvoir un tant soit peu. Si je trouvais un local grand comme la rue Gauguet, je mettrais deux cents petits tableaux en route pour que la couleur sonne comme les affiches sur la nationale au départ de Paris.

Mais voilà, place Saint-Michel, une fille de Marseille qui m'enlève tout le calme pour méditer à mes projets. Une vulgarité, René, telle que cela devient sublime, et ronde comme une pierre tendre. Dieu si j'arrive à faire un nu avec ce phénomène mais j'ai jamais vu un volume pareil à vingt ans.

Je te promets de ces rigolades à ton retour, tu n'as qu'à chasser les mirages.
Ecris-moi si tu as un peu de temps, je vends des pommes au Texas.

Merci encore de ton accueil à mon tableautin.

A toi

Nicolas"

Parc des Princes (Les Grands Footballeurs) - 1952

3 commentaires:

  1. Je cautionne le portrait de la fille de Marseille ! On en mangerait.

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    1. N'est-ce pas, Le Gitan ? Assurément, vous avez le goût, le bon...

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    2. Mais dites-moi, Le Gitan, ne seriez-vous pas particulièrement massiliophile ?

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