Fons vitae - Ravenne, Mausolée de Galla Placidia |
René Char
5 rue Jules-Chaplain
Paris VIe
Si tu peux imaginer ce que cela pouvait être à travers les vitraux colorés.
Ce n'est pas seulement passionnant, cela touche au délire.
A toi de plein cœur.
Nicolas
* * *
Je ne sais pas ce qui figurait au verso de cette carte postale adressée de Ravenne le 14 février 1953 par Nicolas de Staël à René Char. Mais compte tenu des deux phrases du recto, très certainement une photo des mosaïques de la basilique Saint-Vital ou du Mausolée de Galla Placidia - dont il est dit dans le recueil de correspondance entre René Char et Nicolas de Staël déjà évoqué ici que ce dernier conserva une carte. Donc pourquoi pas ce détail bleu ? Il me plaît de l'imaginer. Comme de Staël demande à son ami d'imaginer. Et en quelques mots surgissent l'art, la couleur, la beauté, la passion, l'amitié. Comme l'écrit Sébastien Lapaque dans sa délicieuse Théorie de la carte postale.
"La carte postale, c'étaient donc les mots alliés avec la vie. Dans l'empire de la marchandise, c'étaient l'amour et l'amitié tracés en belles lettres avec la main ; le bonheur et la beauté racontés avec de l'encre et du papier. C'était mieux qu'un objet vivant, c'était de la matière organique. Les limiers de la police scientifique, à qui tous leurs instruments électroniques permettaient de recenser le patrimoine génétique de l'expéditeur, en portaient témoignage. Malgré toutes les préventions de notre monde de perfection hygiénique, destructeur de boîtes aux lettres et dévoreur d'enfance, une carte postale, c'était aussi de la sueur et des larmes. Au recto, on ne reconnaissait pas simplement les pleins et les déliés d'une belle écriture, on retrouvait le tremblement d'une main, l'émotion au bout des doigts, la peur, les délices, l'espérance, la folie - vivants, bien vivants. Et il y avait le timbre, le timbre collé avec de la salive, dépositaire du souffle de l'expéditeur.
Comme un baiser."
Ménerbes - 1953 |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire